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23 janvier 2025
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Communiqué de presse du Conseil-exécutif
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Intervention policière : une couverture médiatique fallacieuse et irrespectueuse de la présomption d’innocence

Une arrestation réalisée par la police en ville de Berne au début de l’été 2021 a beaucoup fait parler d’elle dans les médias. Le Bund et la Berner Zeitung avaient alors comparé les événements survenus et l’assassinat de George Floyd aux États-Unis. Ils ont ainsi présenté l’intervention comme beaucoup plus dangereuse qu’elle ne l’a été dans les faits, cela en toute connaissance de cause. C’est la conclusion à laquelle aboutit le Conseil-exécutif dans un rapport à l’intention du Grand Conseil.

Le rapport du Conseil-exécutif a été établi en exécution de la motion « Abus de pouvoir d’un groupe média : il faut protéger le personnel cantonal ! ». Pour avoir une vision complète de la situation, le Conseil-exécutif a demandé une prise de position à la rédaction du Bund et de la Berner Zeitung. Il a également sollicité un expert indépendant pour qu’il analyse la couverture médiatique de l’arrestation devant l’église du Saint-Esprit (Heiliggeistkirche) à Berne du point de vue du droit des médias et de l’éthique journalistique.

Dans son rapport, le Conseil-exécutif arrive à la conclusion, comme l’expert indépendant, que la relation des faits dans les deux journaux du groupe Tamedia était en grande partie appropriée, mais qu’elle a induit le lectorat en erreur sur des points importants et qu’elle n’a pas respecté la présomption d’innocence. Le rapport du gouvernement sera présenté au Grand Conseil lors de la session d’été 2025.

Rapprochement déplacé avec le cas George Floyd

Le 11 juin 2021, un agent et une agente de la Police cantonale ont procédé à l’arrestation d’un homme blessé devant l’église du Saint-Esprit à Berne. L’arrestation s’est compliquée car l’homme s’est défendu vigoureusement. Pendant l’immobilisation au sol et le menottage, le policier a involontairement laissé glisser son tibia sur le cou de l’homme. Plusieurs journalistes des titres Tamedia Bund et Berner Zeitung présents par hasard ont observé l’arrestation et pris des photos. Dans son article publié le 12 juin 2021, le Bund a repris une citation d’archive d’un médecin légiste, établissant ainsi un rapprochement avec le cas George Floyd aux États-Unis. George Floyd était décédé en mai 2020 en raison de l’extrême violence avec laquelle un policier l’avait immobilisé au sol. Le jour de la parution de l’article, le médecin légiste cité dans l’article est intervenu par écrit auprès du journal pour expliquer que sa citation avait été employée dans un contexte erroné et que les deux cas n’étaient pas comparables.

Une mise au point trop tardive

Par la suite, le Bund et la Berner Zeitung ont validé la publication en ligne de plusieurs commentaires présumés attentatoires à la personnalité. Ils les ont finalement effacés plus de deux ans après l’intervention, suite au dépôt au Grand Conseil d’une motion concernant la couverture médiatique de cet incident. À ce jour, d’autres commentaires attentatoires à la personnalité et sans égard à la présomption d’innocence sont toujours en ligne. L’article paru dans le Bund le 12 juin 2021 a été à l’origine de la publication dans l’ensemble de la Suisse d’une multitude d’articles fallacieux, qui établissaient eux aussi un parallèle avec le cas George Floyd. Une semaine après la parution de son premier article, le Bund a publié ce qu’il a présenté comme une analyse établissant que le cas bernois n’était pas comparable avec le cas Floyd et qu’il fallait garder la mesure. Cette mise au point est arrivée trop tard. Elle ne contenait aucun élément inconnu de la rédaction une semaine plus tôt.

Le policier a été acquitté de la totalité des chefs d’inculpation par le Tribunal régional de Berne-Mittelland, dont le jugement du 5 septembre 2023 est entré en force.

Intérêt indéniable pour le public

Aux yeux du Conseil-exécutif, la couverture médiatique de l’intervention policière n’est pas critiquable en soi. La diffusion de ces informations revêtait indéniablement un intérêt public. Lorsqu’il a rédigé son rapport, le Conseil-exécutif avait bien conscience que seuls les tribunaux ont le pouvoir de juger si un article de presse est conforme au droit ou non. Il est donc à saluer que la rédaction ait expliqué sa démarche en lien avec l’article en cause dans sa prise de position à l’attention du Conseil-exécutif.

Une couverture médiatique en partie fallacieuse et irrespectueuse de la présomption d’innocence selon l’expert

Dans son évaluation, l’expert indépendant du droit des médias, Manuel Bertschi, arrive à la conclusion que la relation des faits dans le Bund et la Berner Zeitung était en grande partie appropriée, mais qu’elle a induit le lectorat en erreur sur des points importants et qu’elle n’a pas respecté la présomption d’innocence. La rédaction du Bund ne s’est pas suffisamment employée à rechercher la vérité, violant ainsi ses devoirs de diligence et donc le code de déontologie des journalistes suisses. À ce jour, la rédaction n’a pas non plus honoré son obligation de rectification immédiate, ce qui constitue également une violation du code de déontologie des journalistes.

Une rectification d’intérêt public

En adoptant la motion, le Grand Conseil a exigé la rectification de certaines informations parues. En effet, seule une réflexion critique peut empêcher que le cas dont il est question ici ne continue d’être exploité à tort dans les médias et la politique dans le contexte d’actes perçus comme de la violence policière excessive et du profilage racial. Une rectification protégerait également le policier concerné, que les médias ont associé à tort à un crime de violence grave. Elle répondrait au devoir d’assistance du canton de Berne envers ses employées et employés, en plus d’être d’intérêt public.

Liberté de la presse toujours garantie

Le Conseil-exécutif est conscient qu’il est inhabituel de critiquer les publications d’un média dans un rapport au Grand Conseil. Il relève cependant que le Parlement cantonal est libre de choisir les sujets sur lesquels il souhaite des clarifications. La liberté de la presse et la compétence de la justice restent garanties. Le Conseil-exécutif a la volonté d’apporter sa contribution à une meilleure compréhension entre les médias et les autorités. Le but devrait être d’intensifier le dialogue et, le cas échéant, de l’institutionnaliser. Des efforts doivent également être fournis afin d’expliquer encore mieux aux médias comment les forces de police travaillent et les défis qu’elles rencontrent.

Vidéo Conférence de presse du Conseil-exécutif

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